Dans un endroit magique de ma connaissance, les petits enfants dorment dans une maison qu’on appelle l’Antre des Lions. Au matin, les yeux encore bouffis de sommeil, ils racontent souvent le même rêve d’un Roi félin au doux pelage fauve…
Jadis, un vrai lion régnait sur cette contrée. Il était venu d’Afrique pour voir du pays et implanter une dynastie sur un territoire vierge. Derrière lui se comptaient des kilomètres de déserts, de mers, de montagnes, pour aboutir ici, sur les berges d’un lac bleu entouré de forêt boréale, un bout de paradis bercé par la douceur du vent d’été, ni trop chaud, ni trop sec. Ainsi, toute une saison, le félin et sa famille s’y prélassèrent, heureux.
Bizarrement, un matin, le lion remarqua que les feuilles des arbres rougissaient, pâlissaient et tombaient. Les animaux qu’il chassait se terraient. Le vent fraichissait. Les premières neiges lui rappelèrent les faces du Kilimandjaro. Décembre apporta beaucoup de flocons. Puis, janvier figea tout le paysage dans des froids intenses. Plus rien ne réchauffait le lion et sa famille. Un matin, le Roi trouva sa lionne et ses petits gelés dans la neige. Des larmes de glace aux yeux, il se coucha alors en boule de fourrure près des siens et attendit sa mort.
Mais ce fut des enfants du village voisin qui vinrent. Tout petits dans l’immensité froide, ils hissèrent le lion sur leur traîneau rouge et le ramenèrent chez eux. Ils firent un feu dans l’âtre et démêlèrent son manteau de glace. Ils lui donnèrent du vin chaud pour raviver ses sens.
Cet hiver-là, tous les jours de froidure, ils prirent soin de lui. Au printemps, quand il fut mieux, les enfants lui bâtirent une cabane dans les bois, pour le soustraire aux regards des curieux. Le Roi redevint fort, fier et beau. Et resta l’ami des petits enfants qui grandirent, eux aussi.
Un jour, quand le lion fut vieux et gris, son souffle s’arrêta. Les grands enfants pleurèrent leur ami et, des années plus tard, où était sa cabane, au bout de la route de terre, ils construisirent une maison-dortoir qu’ils baptisèrent l’Antre des Lions et ils l’offrirent au camp de vacances qui s’était installé là.
Dans le pays, on raconte que toutes les nuits d’été, en souvenir de ses amis, le Roi félin refait le voyage à l’Antre pour protéger, à son tour, les enfants-campeurs qui y dorment. Et si un mauvais rêve vient troubler leur sommeil, les petits se calment en caressant son doux pelage fauve…
France
Merci au Club Lions de Sillery-Québec-Sainte-Foy qui, depuis 1968, soutient la mission du Camp-vacances Kéno.