Rien ne vous surprendra si on vous dit, qu’aujourd’hui, notre mode de vie est urbain, sédentaire, suroccupé et surstimulé. Plusieurs spécialistes mettent de l’avant l’importance des jeux extérieurs, encore plus dans ce contexte de pandémie, qui peut être anxiogène. La recommandation de la Santé publique la plus facile à suivre ? Aller jouer dehors !

On entend de plus en plus parler du déficit nature… mais qu’est-ce que c’est au juste ? Et comment en sommes-nous arrivés à manquer de nature ?

 

Comment en sommes-nous arrivés à manquer de nature ?

Tout d’abord, par notre mode de vie qui est, il faut se l’avouer, déconnecté du monde naturel1. Cette déconnexion est ce que l’auteur et journaliste Richard Louv nomme le déficit nature dans son livre Last Child in the Woods2. Sans que l’on s’en aperçoive, ceci a entraîné une série de changements dans notre quotidien.

 

1. Moins d’accès aux espaces naturels

 

Ça peut paraître banal, mais aller en nature quand on habite en ville, c’est devenu compliqué. Pour les citadins, les grands espaces verts ne sont souvent accessibles qu’en voiture. Les enfants doivent souvent être accompagnés d’un adulte pour se rendre dans les parcs municipaux qui sont aménagés au cœur de leur quartier. On assiste aussi à un phénomène de privatisation de la nature (mais ça, c’est un tout autre sujet de blogue en soi).

 

 

 
2. (BEAUCOUP) PLUS DE TEMPS PASSÉ À L’INTÉRIEUR

Une étude de l’Université de Hofstra de 20043 révèle que 70 % des mères interrogées ont affirmé jouer dehors tous les jours étant jeunes, contre 31 % de leurs enfants. En 2011, un Nord-américain moyen réalisait 95 % de ses activités à l’intérieur4. Et cela n’a pas beaucoup changé aujourd’hui ! De manière générale, les enfants habitant au Canada passent au quotidien 7 heures devant un écran5. Si on ajoute le temps passé à l’école et les activités sportives et de loisir pratiquées à l’intérieur, cela fait beaucoup de « dedans » et très peu de « dehors ». Par ailleurs, comme le mentionne l’auteur et journaliste François Cardinal en parlant de son livre Perdus sans la nature, « les enfants d’aujourd’hui sont la première génération pour qui aller à l’extérieur est une punition »6. Pour Kéno, le dehors devrait pourtant être le monde des enfants…

 
3. UNE DIMINUTION DU TEMPS DE JEU ET MOINS DE JEUX LIBRES  

Les enfants passent plus de temps à faire des devoirs ou à pratiquer des activités structurées à visées éducatives. Puisque les deux parents doivent souvent travailler jusqu’à 17 h, les heures passées au CPE ou au service de garde après l’école se prolongent. Les jeunes passent aussi plus de temps devant LES écrans ou « en sécurité » dans le confort de la maison. Le temp de récréation à l’extérieur diminue et leurs temps libres aussi. Le jeu libre et créatif à l’extérieur ne fait plus partie du planning… pas le temps. Et pourtant !

 
4. UNE INSÉCURITÉ GRANDISSANTE DE LAISSER LES ENFANTS JOUER DEHORS (PAR EUX-MÊMES)

Les parents ont de plus en plus peur de laisser leurs enfants seuls. Se faisant et bien malgré eux, ils les restreignent dans leurs possibilités de découvertes extérieures. À l’intérieur, il y a de quoi se divertir : jouets, jeux vidéo, télévision, tablette, cellulaire, et plus encore ! On occupe les enfants entre quatre murs. Moins de blessures, d’engelures, d’échardes, de petits bobos…Mais on risque alors de les priver des bienfaits de la nature.

 

5. ON NE CONNAÎT PLUS LA NATURE

 

Qui peut nommer les essences d’arbres ? Reconnaître les plantes ou le cri d’un oiseau ? Lire un cours d’eau ? On a oublié ce qu’est la nature. Cette méconnaissance cause une indifférence et un sentiment de crainte. La peur de l’inconnu freine les envies d’exploration du monde naturel, et de toutes les belles découvertes qui s’y cachent ! 

 

Selon plusieurs études, le contact avec la nature comporte de nombreux avantages, pour les jeunes comme pour les moins jeunes.

 

 
5 bénéfices du jeu en plEIN air et de la nature sur les jeunes
1. SUR LE DÉVELOPPEMENT D’UNE CONSCIENCE ÉCOLOGIQUE

L’étude « Experiencing nature in children’s summer camps : Affective, cognitive and behavioral consequences »7 conclut qu’une exposition à la nature à long terme génère chez les enfants une affinité émotive avec la nature et des croyances écologiques. Par des expériences positives en nature, les enfants développent un amour pour ce qui est vivant et l’envie de le protéger. 

 
2. SUR LA SOCIALISATION

Les moments en plein air sont propices au développement de relations sociales et diminuent les risques de repli sur soi. Pour les familles, les sorties à l’extérieur ont un impact positif sur la dynamique. Pour la communauté, un environnement riche en milieux naturels contribue à l’amélioration des relations entre voisins, au développement d’une appartenance communautaire et à la réduction du taux de crime8

 

3. SUR LA SANTÉ PHYSIQUE

L’activité physique a une influence positive sur le taux de maladies chroniques, d’obésité, de stress et des troubles du comportement9. Chez les enfants, la pratique du jeu en plein air permet un meilleur développement psychomoteur et a un effet positif sur la coordination, la dextérité manuelle, la motricité fine, l’autonomie physique et l’acuité des cinq sens. 

 
4. SUR LA SANTÉ MENTALE10

Le contact avec la nature a de nombreux effets sur la santé mentale et sur les performances cognitives et intellectuelles. Il permet d’avoir une meilleure gestion du stress, de restaurer l’attention et d’éliminer la fatigue découlant d’une activité demandant une attention dirigée (cela pourrait avoir un effet positif sur les troubles du comportement, notamment le trouble du déficit d’attention). Chez les enfants, on remarque particulièrement une augmentation de l’estime et de la confiance en soi, une meilleure gestion du risque et des dangers, une capacité d’autodiscipline, une exploration plus poussée des limites et un plus grand sentiment de liberté. Plusieurs études démontrent un lien fort entre le fait de se sentir connecté avec la nature et le fait de se sentir heureux. 

 
5. SUR LE SAIN DÉVELOPPEMENT DES ENFANTS

La nature stimule l’imagination, la curiosité et la créativité. Jouer dehors améliore la concentration, la capacité d’attention, la motivation, l’implication à l’école, l’autonomie, la capacité à résoudre des problèmes et le sens de l’empathie. 

La nature est un milieu d’apprentissage hors du commun. Profitons-en ! 

 

 

Quelques idées de jeux libres en nature

Quand on a la chance d’avoir accès à un milieu naturel, le jeu libre avec son jeune, c’est aussi simple que :

  • Explorer la forêt
  • Lancer des cailloux dans l’eau
  • Cueillir un bouquet de fleurs
  • Monter sur la montagne de neige et glisser
  • Se rouler dans les feuilles
  • Marcher sur la glace
  • Courir sous la pluie
  • Frapper des branches sur une roche 
  • Courir entre les arbres
  • Grimper sur une grosse roche
  • Faire un bricolage nature

Découvrez d’autres idées de jeux à faire à la maison ou au parc.

 

 

Elisabeth Fortin

Campeuse et employée à Kéno depuis 2001

Adjointe au service à la clientèle et au soutien administratif

 

 

 

 


 

Références
  1. Caroline (2016). Nos enfants souffrent-ils du trouble du déficit de nature ?  Sur Apprendre à éduquer.  http://apprendreaeduquer.fr/nos-enfants-souffrent-trouble-de-deficit-de-nature/
  2. Louv, R. (2020). Une enfance en liberté : protégeons nos enfants du syndrome de manque de nature. [Traduit de l’anglais] Éditions Leduc, 192 p. https://www.renaud-bray.com/Livres_Produit.aspx?id=3216758&def=Une+enfance+en+libert%c3%a9+%3a+prot%c3%a9geons+nos+enfants+du+syndrome+de+manque+de+nature%2cLOUV%2c+RICHARD%2c9791028516802
  3. Clements, R. (2004). An Investigation of the Status of Outdoor Play. Dans Contemporary Issues in Early Childhood  5(1), p. 68-80.  https://www.researchgate.net/publication/250151481_An_Investigation_of_the_Status_of_Outdoor_Play
  4. Reeves, F. (2011). Planète Cœur : santé cardiaque et environnement. Éditions MultiMondes et Éditions du CHU Sainte-Justine, 216 p. https://editionsmultimondes.com/livre/planete-coeur/
  5. Institut national de santé publique du Québec (2016). Le temps d’écran, une autre habitude de vie associée à la santé. Dans TOPO (12) https://www.inspq.qc.ca/pdf/publications/2154_temps_ecran_habitudes_vie.pdf
  6. 100 degrés (2017). Jouer dehors : faire face au déficit nature | François Cardinal | 100°Montréalhttps://www.youtube.com/watch?v=uXwJ4fAYKuQ
  7. Collado, S., Staats, H. et Corraliza, J.A. (2013). Experiencing nature in children’s summer camps : Affective, cognitive and behavioural consequences. Journal of Environmental Psychology (33), p. 37-44. https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0272494412000497
  8. Bellerose-Langlois, A. (2015). Lutter contre le déficit nature grâce à l’éducation formelle : recommandations aux acteurs décisionnels de l’éducation primaire québécoise. Maîtrise en environnement, Université de Sherbrooke. https://www.usherbrooke.ca/environnement/fileadmin/sites/environnement/documents/Essais_2015/Bellerose_Langlois_Angelie_MEnv_2015.pdf
  9. Idem.
  10. Idem.